Lettre à Gustave Lassalle-Bordes, 16 novembre 1849

  • Cote de la lettre ED-IN-1849-NOV-16-A
  • Auteur Eugène DELACROIX
  • Destinataire Gustave LASSALLE-BORDES
  • Date 16 Novembre 1849
  • Lieux de conservation Paris, bibliothèque de l'INHA, collections Jacques Doucet
  • Éditions précédentes Joubin, Correspondance générale, 1936-38
    , t. II, p. 408-409.
  • Enveloppe Non
  • Nombre de pages écrites 3
  • Présence d’un croquis Non
  • Dimension en cm 20,2x26,6
  • Cachet de cire Non
  • Nature du document Transcription
  • Cote musée bibliothèque Ms. 245 pièce 14 bis
  • Œuvre concernée Chapelle des Saints-Anges, église de Saint-Sulpice
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Transcription modernisée

À M. Lassalle-Bordes à Bezolles,
Canton de Valence-sur-Baïse (Gers)1

Champrosay, 16 novembre 1849
(Seine-et-Oise)

Mon cher Lassalle,

Je reçois enfin de vos nouvelles et j’apprends avec bien du chagrin l’accident qui vous est arrivé2. Je ne vous parlerai de ce qui me concerne dans cet événement qu’après que je vous aurai témoigné la part que j’y prends, pour ce que vous avez souffert et pour le retard que vous avez dû éprouver dans toutes vos entreprises. Je sais combien vous êtes utile à toute votre famille et combien dans ce moment vous devez maudire l’obstacle qui s’oppose à vos travaux. Je n’étais pas inquiet sans sujet à votre occasion : je ne pouvais comprendre qui vous arrêtait encore. J’avais tout disposé suivant nos conventions pour qu’il fût possible de commencer les travaux de la charpente le plus tôt possible. Nous aurions maintenant achevé tous nos travaux préparatoires et nous serions en pleine exécution. Ce contretemps, indépendamment du temps perdu pour les travaux de Saint-Sulpice3, aura un fâcheux effet sur mon exposition du Salon, dont j’aurais pu m’occuper si je n’avais tout disposé pour mes esquisses et cartons pour la Ville. Je serais désolé au reste d’augmenter votre contrariété, en vous entretenant longuement de tout le dérangement que j’ai eu en ceci. Ne pensez qu’à vous bien guérir et à revenir au plus tôt. N’est-il pas affreux qu’en pays civilisé et en pleine paix, un homme puisse être arrêté au milieu de toutes ses affaires par une attaque sauvage digne des temps de barbarie, où il n’y a de protection que pour les scélérats ?

Adieu, mon cher Lassalle, comptez de toute manière sur ma vive amitié et le désir que j’ai de vous voir bientôt en état de reprendre nos travaux et maître de votre talent.

Votre bien dévoué,

Eugène Delacroix

En octobre 1849 je fus mordu très gravement par un gros chien de montagne, qu’un goujat de village dont je ne partageais pas les opinions excita contre moi pendant que je passais tranquillement sur le chemin public. Le seul moyen de le châtier sensiblement était de lui intenter un procès en dommages et intérêts. C’est [ce] qu’on me conseilla de faire : c’est à cette occasion que Delacroix m’envoya la déclaration annexée à la lettre n° 14.

Lassalle Bordes


1 La lettre est une transcription de l’originale réalisaée par Lassalle-Bordes pour la deuxième édition de la correspondance de Burty.
2 Voir la note que Lassalle-Bordes rajoute à la fin de sa transcription
3 Pour la décoration de la chapelle des Saints-Anges.

Transcription originale

Page 1

a Monsieur Lassalle Bordes à Bezolles a Bezolles
Canton de Valence sur Baïse (Gers)

Champrosay 16 nov. 1849.
(Seine et Oise)

Mon cher Lassalle,

Je reçois enfin de vos nouvelles et j’apprends
avec bien du chagrin l’accident qui vous est
arrivé. Je ne vous parlerai de ce qui me
concerne dans cet evenement qu’après que je
vous aurai témoigné la part que j’y prends,
pour ce que vous avez souffert et pour le
retard que vous avez du eprouver dans toutes
vos entreprises. Je scais combien vous êtes
utile à toute votre famille et combien dans ce
moment vous devez maudire l’obstacle qui
s’oppose à vos travaux. Je n’étais pas inquiet
sans sujet à votre occasion : Je ne pouvais
comprendre qui vous arrêtait encore.
J’avais tout disposé suivant nos conventions
pour qu’il fût possible de commencer les
travaux de la charpente le plutôt possible.

Page 2

Nous aurions maintenant achevé tous nos
travaux préparatoires et nous serions
en pleine exécution. Ce contretemps
indépendamment du temps perdu pour les
travaux de St Sulpice aura un fâcheux
effet sur mon exposition du Salon dont
j’aurais pu m’occuper si je n’avais tout disposé
pour mes esquisses et cartons pour la Ville.
Je serais désolé au reste d’augmenter votre
contrarieté en vous entretenant longuement
de tout le dérangement que j’ai eu en ceci ;
ne pensez qu’a vous bien guérir et à
revenir au plutot. N’est-il pas affreux
qu’en pays civilisé et en pleine paix,
un homme puisse être arrêté au milieu
de toutes ses affaires par une attaque
sauvage digne des temps de barbarie
où il n’y a de protection que pour les
scélérats.

Adieu mon cher Lassalle, comptez
de toute manière sur ma vive amitié

Page 3

et le désir que j’ai de vous voir bientôt
en etat de reprendre nos travaux et
maître de votre talent.

Votre bien dévoué

EugDelacroix

En oct. 1849 je fus mordu très
gravement par un gros chien de montagne
qu’un goujat de village dont je ne partageais
pas les opinions excita contre moi pendant
que je passais tranquillement sur le chemin
public. Le seul moyen de le châtier
sensiblement était de lui intenter un procès
en dommages et intérêts C’est qu’on me
conseilla de faire : c’est à cette occasion que
Delacroix m’envoya la déclaration annexée
à la lettre n° 14 —

Lassalle Bordes

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