Lettre à Alexandrine Lamey et Guillaume-Auguste Lamey, 29 décembre 1855

  • Cote de la lettre ED-IN-1855-DEC-29-A
  • Auteur Eugène DELACROIX
  • Destinataire Alexandrine LAMEY
  • Date 29 Décembre 1855
  • Lieux de conservation Paris, bibliothèque de l'INHA, collections Jacques Doucet
  • Éditions précédentes Joubin, Correspondance générale, 1936-38
    , t. III, p. 311-312.
  • Enveloppe Non
  • Nombre de pages écrites 4
  • Présence d’un croquis Non
  • Dimension en cm 20,7x27
  • Cachet de cire Non
  • Nature du document Lettre Autographe Signée
  • Cote musée bibliothèque Ms. 238 pièce 14
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Transcription modernisée

Ce 29 décembre 1855

 

Chère et bonne cousine,

 

Vous êtes trop bonne, trop aimable ; je suis confus de vos charmants envois : le dernier que vous m’avez fait a la plus belle mine du monde et je ne tarderai pas, suivant vos avis, à faire l’essai de toutes les qualités qu’il promet. Bonne amie, vous me comblez : les soins, l’amitié touchante que vous m’aviez montrés à Strasbourg, pendant mon séjour trop court pour mon cœur, m’ont déjà rempli d’une bien vive reconnaissance1. Soignez-vous bien mais croyez-moi : le repos, un peu d’exercice quand il ne fait pas trop froid vaudront mieux pour votre vilain rhume que toutes les tisanes. J’en ai fait l’essai récemment : j’ai eu à mon retour à Paris un rhume obstiné que je ne pouvais guérir ; je me suis renfermé pendant près de quinze jours et j’ai été débarrassé.

Je n’ai pas besoin de vous renouveler les vœux que je forme pour vous au commencement de l’année qui va commencer : le plaisir que j’ai eu à me réunir à vous et à mon cousin est un garant de celui que j’aurai à voir se renouveler aussi longtemps que possible d’aussi charmantes occasions. Je me réserve de le lui répéter à lui-même à la page suivante et vous embrasse bien du fond du cœur.

 

Eugène Delacroix

 

Cher cousin, je vous remercie bien de votre aimable souvenir. Vous me parlez des commérages des journaux belges à mon sujet : ce sont tout simplement de ces mille moyens de remplir les pages, sauf à démentir plus tard, ce qui procure à ces messieurs deux occasions d’avoir de la copie qui ne leur coûte rien. Je vois que vous ne changez rien à votre excellente méthode, qui du reste est la mienne, de remédier à tous les petits maux par la patience et le repos. C’est ainsi et en persévérant que nous aurons longtemps l’occasion et le bonheur de nous voir et de nous communiquer des idées. Après le boire et le manger, qui [sont] pour le corps, le plus grand besoin de notre nature est de vivre par l’intelligence : je parle bien entendu du petit nombre des humains. Tenez-moi au courant de votre publication2 et, si vous en avez l’occasion, ne m’oubliez pas pour le portrait. Mille compliments et bons souvenirs à M. Schuler3. Je vous embrasse bien, cher cousin, et nourris l’espoir de vous voir à Paris cette année, ainsi que la bonne cousine.

Votre bien sincèrement dévoué.

Eug. Delacroix4

Eugène Delacroix.

 


1 Delacroix a séjourné chez ses cousins du 19 septembre  au 2 octobre 1855, avec une excursion de quelques jours à Baden-Baden.
2 Guillaume-Auguste Lamey écrit des recueils de poésies et des pièces de théâtre. L’ouvrage évoqué est sans doute Gedichte, publié en édition augmentée en 1856 (l’édition originale date de 1836).
3
Charles-Auguste Schuler (Strasbourg 1804 - 1859), graveur, dessinateur et peintre. Il est l’élève de son père, puis de Guérin et de Gros. Il expose pour la première fois en 1824 au Salon et devient professeur de dessin à l’Institut Aufschlager à Strasbourg. Il est membre fondateur de la Société des Amis des arts de Strasbourg en 1832, laquelle a publié nombre de ses burins.
Delacroix l’a rencontré à l’atelier de Guérin puis retrouvé lors de son séjour chez ses cousins. A propos de Schuler, voir aussi la note 4 de la lettre du 30 novembre 1855 et Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 2333.
4 Inscription postérieure.

 

Transcription originale

Page 1

Ce 29 dec. 1855

 

Chère et bonne cousine,

 

Vous etes trop bonne, trop
aimable ; je suis confus de vos
charmants envois : le dernier que
vous m’avez fait à la plus belle
mine du monde et je ne tarderai
pas suivant vos avis à faire l’essai
de toutes les qualités qu’il promet.
Bonne amie vous me comblez :
les soins, l’amitié touchante que
vous m’aviez montré à Strasbourg
pendant mon séjour trop court
pour mon cœur, m’ont dejà
rempli d’une bien vive reconnais-
-sance. Soignez vous bien, mais
croyez moi : le repos, un peu d’exer-
-cice quand il ne fait pas trop
froid vaudront mieux pour votre

 

Page 2

vilain rhume que toutes les tisanes.
j’en ai fait l’essai recemment : j’ai
eu à mon retour à Paris un rhume
obstiné que je ne pouvais guerir ; je
me suis renfermé pendant près de
15 jours et j’ai eté debarrassé.

Je n’ai pas besoin de vous renou-
-veller les vœux que je forme pour vous
au commencement de l’année qui va
commencer : Le plaisir que j’ai eu à me
réunir à vous et à mon cousin est
un garant de celui que j’aurai à voir
se [mot barré illisible] renouveller aussi longtemps
que possible d’aussi charmantes occasions.
Je me reserve de le lui repeter à lui meme
à la page suivante et vous embrasse
bien du fond du cœur.

EugDelacroix

Cher cousin, je vous remercie
bien de votre aimable souvenir. vous
me parlez des commérages des journaux

 

Page 3

belges à mon sujet : ce sont tout
simplement de ces mille moyens
de remplir les pages, sauf à dementir
plus tard, ce qui procure à ces Messieurs
deux occasions d’avoir de la copie qui
ne leur coute rien. Je vois que vous
ne changez rien à votre excellente
methode, qui du reste est la mienne,
de remedier à tous les petits maux
par la patience et le repos. C’est
ainsi et en perseverant que nous
aurons longtemps l’occasion et le
bonheur de nous voir et de nous
communiquer des idées. après le boire
et le manger qui est pour le corps, le
plus grand besoin de notre nature est de
vivre par l’intelligence : je parle bien enten-
-du du petit nombre des humains.
Tenez moi au courant de votre publica-
-tion et si vous en avez l’occasion ne
m’oubliez pas pour le portrait. mille compli-
-ments et bons souvenirs à Mr Schuler.
Je vous embrasse bien, cher cousin et nourris
l’espoir de vous voir à Paris cette année, ainsi

 

Page 4

que la bonne cousine.  Eug. Delacroix

Votre bien sincerement devoué

EugDelacroix.

 

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